mercredi 23 janvier 2013

Je m’appelle César et je suis toujours là


Une grosse femme se promène dans un dépotoir en portant sur son dos une gigantesque canne de conserve de bananes et sous ses bras des kilos de briques de beurre enveloppées d’aluminium. Son petit garçon lui dit : « Maman, tu ne vas pas manger ça? Tu es dégueulasse! »

Je m’appelle César et je suis toujours là.

Je prends une drogue et je m’assois contre une poubelle au milieu des immondices. Je ne bouge jamais, je ne parle pas ni ne mange ni ne dort. Je dessine parfois dans mon carnet. Et les gens trouvent que j’ai l’air gentil comme la statue d’un saint. Ils disent que je suis un ange et me nomment l’archange Michael. Une fille vient me voir qui fait un peu d’embonpoint. Mais j’aime ses cuisses blanches et dodues. Je décide de la suivre et j’oublie mon carnet.

Maintenant, on se promène dans la ville et nous sommes toujours ensemble. Nous ne parlons jamais, ni moi avec elle, ni elle avec moi. On ne mange pas et bientôt, on ne bouge plus. Nous sommes nus et assis comme des chiens malades sur le bord du chemin, nos jambes croisées devant nous pour cacher notre sexe. Nous sommes maigres, sales et couvert d’escarres.

Soudainement, on devient très riche même si on n’a jamais d’argent sur nous. Nous pouvons tout faire.
Nous allons dans la cuisine d’une pâtisserie et mon copain prend de la pâte à biscuit aux brisures de chocolat dont il tartine la porte d’un frigidaire pour la licher complètement. Comme c’est trop riche et trop sucré pour son estomac qui n’a rien mangé depuis des semaines, il tombe malade sur le sol et perd conscience. Mais je ne suis pas inquiète pour lui, je sais qu’on ne peut pas mourir. Je suis plus délicate que lui et je préfère prendre trois cupcakes au soya, sans gluten. Je les colle par la base sur la porte du réfrigérateur pour les tartiner de glaçage. Le premier avec du crémage blanc au citron, le deuxième en bleu au bleuet et le troisième rose vieux rose à l’eau de rose. Les gâteaux sont superbement bons, moelleux, spongieux, tendres et juteux. La pâte est rose et turquoise et parfois jaune. C’est sublimissime!

Nous choisissons une destination soleil dans des guides de voyage. On trouve une île tropicale complètement déserte. Elle nous appartient. Nous sommes seuls. Il y a des têtes et des mains dans le sable. Nous restons couchés sur la plage toute la journée à dorer sous les rayons du soleil jusqu’à ce que notre peau soit brune, calcinée et toute vieillit.

Mon copain écrit qu’il m’aime en espagnol sur le sable avec un bâton. Il écrit si gros que cela recouvre l’île en entier et les avions peuvent le lire quand ils nous survolent. La nuit, nous allons dormir dans des sarcophages de salon de bronzage. Durant notre sommeil, nos têtes se détachent de notre corps pour aller s’embrasser et changer de corps, j’ai la sienne et il a la mienne. Et c’est ainsi qu’il apprend que je suis enceinte de lui.

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